Ah la rentrée littéraire et cette cohorte de titres… Toujours plus mais les Français lisent de moins en moins dit-on. Pourtant un livre se démarque dans cette fourmilière de scribouillards. Alors ce n’est pas un roman aux forts relents autobiographiques où un auteur raconte comment son oncle très méchant a abusé de lui en trichant au Monopoly dans leur villa à Dinard durant l’été 78, ce qui a conduit cet auteur dans l’alcoolisme, la drogue, l’écriture, pour s’apercevoir qu’en réalité il était TDAH. Pourtant sur le papier, ça donne envie. Ça sonne fort. Non, il ne s’agit pas de cela. Il ne s’agit pas non d’une bromance entre Tony et Samantha, deux jeunes new-yorkais qui décident de s’aimer malgré les préjugés, il tient un Pizza Hut, elle est allergique aux pizzas.
Non, il est question de cinoche, de vrai cinoche, du cinoche avec des tronches, des répliques qui claquent, des coups de pétard dans tous les sens, des femmes qui vivent la nuit, des rebondissements en veux-tu en voilà… Bref un bouquin sur les films policiers !

En plus, pas n’importe quels films policiers, les Français, les franchouillards, ceux de notre terroir ! Donc qui veut dire film policier français, veut dire Gabin, Delon, Ventura, Audiard, Blier, Verneuil, Corneau, Clouzot, Grangier, Lautner, Montand, Trintignant, Lanoux, Noiret, Serrault… La liste est longue. Rien que des noms qui font saliver.
100 films policiers français à voir absolument, tel est le titre de cet ouvrage. Un titre qui permet de se faire une idée précise du contenu de ledit ouvrage. 100 films. Ça fait pas mal de films. De quoi occuper ses longues soirées d’hiver. Il y a de tout dans cette liste, à part des nanars qui tâchent : il y a du chef-d’œuvre, du grand classique, du film sérieux et efficace, de l’intéressant, du très sympathique, du nostalgique… La liste se veut exhaustive (il n’y a pas de classement) mais il y a beaucoup d’affect. C’est normal. Le cinéma c’est avant tout subjectif. Comprenez qu’il y a des oublis volontaires.
Chaque fiche de film se présente de la façon suivante :
– Un « point de départ », où je détaille avec minute les premières minutes du film. C’est une mise en bouche, une petite gorgée de bière chère à Philippe Delerm, avant la belle et la grande pinte. Attention, il n’y a pas de révélations fracassantes, de spoil comme on dit quand on copule avec les anglicismes les plus obséquieux.
– « Sur le film », rubrique la plus consistante où je raconte l’histoire du film, comment il s’est fabriqué, (Série noire ou idée géniale qui a germé dans un cerveau malade ?), qui était préposé au rôle principal, qui l’a supplanté dans la dernière ligne droite, les brèves de comptoir des réalisateurs tiraillés entre des stars exigeantes (c’est un euphémisme) et des producteurs près de leurs sous, etc.
– Enfin une « fiche technique » qui permet de savoir qui était le directeur de la photographie sur Panique (1946) de Julien Duvivier (en l’occurrence Nicolas Hayer), le compositeur de la musique de Max et les Ferrailleurs (1971) de Claude Sautet (le grand Philippe Sarde), ou qui joue le rôle de Dédé la mitraille dans Les Ripoux (1984) de Claude Zidi.
Le tout dans un style accessible à tous. Ça ne veut pas dire qu’il y a des coloriages à la fin de chaque chapitre, ou des grilles de sudoku, mais si vous l’achetez, vous n’allez pas vous retrouver en face d’un pensum universitaire aussi puissant qu’un Lexomil. Le cinéma est un art vivant, un art de la discussion, de l’enthousiasme, du débat, du parti pris, des émotions fortes… C’est pourquoi j’ai voulu que ce livre soit agréable à lire. De plus, écrire très sérieusement à la manière d’un thésard renfrogné, je n’y arrive pas.
Il ne me reste plus qu’à vous souhaiter une bonne lecture (le livre est dispo à la commande sur Mareuil Éditions, la Fnac, Amazon, votre libraire préféré…). Vous avez de quoi occuper vos longues soirées d’hiver, tant en films à voir, qu’en lecture. Et si jamais l’ouvrage vous tombait des bras, parce que vous réalisez qu’au fond votre truc, c’est plus Comment se faire larguer en 10 leçons (2003) que Quai des Orfèvres (1947), alors ce bouquin pourra toujours vous servir comme cale pour un gros meuble. Et ça, ce n’est pas négligeable.
Votre dévoué Philippe-Henri